Jornal COMBATE - 2 publicações Vosstanie Editions

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quinta-feira, 21 de janeiro de 2016

1961 L'Angola colonial, histoire et société / Christine Messiant

1961 L'Angola colonial, histoire et société. 
Les prémisses du mouvement nationaliste

11 novembre 1975, au terme d'une longue guerre d'indépendance (1961-1974), l'Angola se libère de la tutelle portugaise. Durant ces quatorze années de guerre, deux, puis trois mouvements nationalistes ont lutté contre l'armée coloniale tout en s'opposant les uns aux autres, et cet affrontement s'est prolongé en une guerre civile de près de trente ans qui n'a connu son terme qu'en avril 2002. 

Christine Messiant propose, dans cet essai de sociologie historique du colonialisme, une analyse détaillée et approfondie de la société angolaise à la veille des révoltes de 1961. Elle y décortique notamment les rapports complexes, après plus de quatre siècles de présence portugaise en certains points du pays, entre blancs, noirs, métis, créoles, "assimilés" et "indigènes", ainsi que les dynamiques historiques de l'intégration des sociétés angolaises au noyau colonial. 

Elle dissèque également les liens complexes entre l'histoire du métissage culturel en Angola et l'émergence des différents courants du nationalisme angolais, offrant ainsi une précieuse contribution à l'historiographie de l'Etat colonial et à l'étude du nationalisme en Afrique.

 P. Schlettwein Publishing Switzerland 444p. ISBN 9783908193176.

L'historiographie ouvrière au Portugal / José Pacheco PEREIRA

L'historiographie ouvrière au Portugal 
José Pacheco PEREIRA*

 Le Mouvement social, n° 123 (avril-juin 1983)

* Ancien Maoïste, ancien membre du PSD (Partido Social Democrata) de centre droit et
Biographe du dirigeant Stalinien Álvaro Cunhal.


Faire le bilan de l'historiographie des mouvements sociaux au Portugal, et tout particulièrement de l'historiographie ouvrière, c'est d'abord suivre les vicissitudes de l'histoire portugaise contemporaine. Le Portugal contemporain s'est forgé d'abord à travers une longue guerre civile entre libéraux et absolutistes, ensuite à travers le conflit idéologique, politique et militaire entre monarchistes et républicains, puis à travers les longues années de la dictature de Salazar et de Caetano, et enfin, à travers les tumultes du 25 avril 1974. La révolution industrielle a été un phénomène tardif, qui ne s'est jamais présenté comme une véritable révolution, mais plutôt comme une lente croissance industrielle.

Du point de vue social, l'Ancien Régime a disparu avec les guerres napoléoniennes (que nous appelons les «invasions françaises ») et les révolutions libérales du premier tiers du XIXe siècle. En revanche, l'avènement du prolétariat industriel ne s'est fait qu'un demi-siècle plus tard. Cette histoire économique et sociale,marquée par des processus initiaux à peine comparables aux modèles européens, contraste avec le caractère tumultueux de l'histoire politique. Ceci a placé les contemporains dans la nécessité de «problématiser » le Portugal. « Expliquer », « comprendre » le Portugal est ainsi devenu, depuis Oliveira Martins (1849-1894), le programme qui a passionné les historiens portugais dans leur dessein d'aller plus loin dans l'analyse de la spécificité du cas portugais.

L'avènement même des études ouvrières est lié au souci de comprendre quelle était la « modernisation » possible au Portugal et, en particulier,quel rôle la classe ouvrière, en tant que classe produite par l'industrie moderne et le capitalisme, aurait à jouer dans la destinée nationale. Les polémiques sur le libéralisme et le socialisme, sur la nécessité des réformes ou l'inévitabilité de la révolution, ont représenté, à tour de rôle, des façons de reprendre cette problématique, à laquelle l'histoire sociale ainsi que l'histoire des idéologies et des organisations de classe offraient une nouvelle contribution.

C'est ainsi que l'historiographie ouvrière au Portugal s'est toujours rattachée davantage à la politique, au sens large du terme, qu'au développement propre de la connaissance historique universitaire. Ceci explique que sa périodisation recoupe presque totalement les événements politiques qui ont aidé à l'écrire, tantôt en la mettant en valeur, tantôt en la refoulant. Le premier essor des grèves, l'impact de la Commune de Paris, la création du Parti socialiste, vont révéler, dans 1*décennie de 1870, qu'il existait, au Portugal aussi, un prolétariat agent.

Autour de lui, de ses idées et de ses organisations, qui prétendaient expliquer ou seulement exprimer le sens de son action, il se produisait une « histoire » dont il fallait désormais comprendre les effets. En 1896, Silva Mendes a publié le premier essai d'exposé des principes de l'anarchisme, auquel s'ajoutait une esquisse d'histoire concrète du mouvement ouvrier portugais, alors dans sa vingtième année (1). Ouvrage pionnier, il reste une tentative isolée pour dépasser les besoins immédiats du mouvement au cours d'une période difficile de l'action ouvrière.

Ce n'est donc qu'en 1905-1906 que le mouvement ouvrier et la « question sociale » ont reçu, pour la première fois, un traitement systématique de la part des milieux universitaires. Quatre synthèses historiques et doctrinaires ont été alors publiées par Luis Gonçalves, J. Campos Lima, Fernando Emídio da Silva et José Lobo d'Avila Lima (2). Deux d'entre eux ont continué à s'intéresser à l'histoire et à l'action ouvrières : Campos Lima, un universitaire anarchiste qui a accompagné et soutenu les luttes ouvrières pendant toute sa vie; et Emidio da Silva, qui a consacré une partie de ses travaux au mouvement social au cours de sa carrière de professeur d'université.

L'intérêt grandissant pour les thèmes sociaux au début du XXe siècle s'explique en partie par l'influence du positivisme et du mouvement républicain, dont le radicalisme a conduit à des positions de franche sympathie avec les luttes sociales, le socialisme, voire l'anarchisme. Les besoins du Parti républicain en matière d'agitation et d'organisation l'ont amené à soutenir les mouvements de grève et les organisations ouvrières. Cette alliance pratique, souvent consolidée à travers les liens communs avec la franc-maçonnerie et d'autres organisations secrètes, a poussé les républicains à s'intéresser à la «question sociale » et à publier dans leur presse des articles sur ce qu'ils nommaient « la destinée du prolétariat ».

Du côté des monarchistes, on décèle aussi une certaine préoccupation à l'égard des questions sociales. Il s'agissait pour eux d'essayer d'éviter, au moyen d'une politique paternaliste et réformiste, la convergence entre la lutte politique des républicains et les conflits sociaux. Le destinataire privilégié de ces efforts des monarchistes était le Parti socialiste. Enfin, comme toile de fond de cet intérêt grandissant porté à la classe ouvrière et à son action, on doit mentionner l'attention avec laquelle l'intelligentsia portugaise de l'époque suivait les conflits sociaux en Europe, ainsi que les développements du mouvement socialiste international, en particulier les succès de la social démocratie allemande.

Dans l'ensemble, les ouvrages publiés autour de 1905 représentent un tournant dans l'historiographie ouvrière au Portugal. Malgré les limitations de leurs sources et les répétitions dues à l'utilisation des mêmes matériaux, malgré la faible élaboration à laquelle ils ont soumis ces matériaux, ils représentent néanmoins la première somme de documents et de renseignements que nous possédons sur les débuts du mouvement ouvrier portugais. En outre, ces ouvrages ont été capables de faire les distinctions nécessaires sur les tendances et les orientations du mouvement, ce qui rend aujourd'hui encore leur usage obligatoire. Leurs objectifs universitaires, ainsi que leur allure idéologique, en font aussi des témoins irremplaçables de la pensée dominante de l'époque. En particulier, ils témoignent du paternalisme bienveillant et réformateur des dernières années de la Monarchie, caractérisé par la distinction nette entre les « bons » ouvriers, qui méritaient le souci réformateur du pouvoir, et les « mauvais » ouvriers, en particulier les agitateurs anarchistes, qui en revanche n'appelaient que le châtiment. Seul Campos Lima échappe à cette tendance, en exprimant une compréhension interne au mouvement, plus proche des objectifs des luttes ouvrières, ce qui s'explique du fait de son rôle de militant anarchiste.

Pour la nouvelle classe dirigeante républicaine, la sauvegarde du régime devient la question prioritaire, et les conflits sociaux sont vus par elle comme devant se subordonner aux besoins du régime révolutionnaire. Aussi va-t-elle conduire au divorce grandissant et de plus en plus sanglant entre les nouvelles autorités politiques et le mouvement ouvrier organisé. Celui-ci était désormais dominé par les syndicalistes révolutionnaires, qui faisaient depuis 1908 une propagande intense de leurs principes et qui avaient trouvé dans la vague de grèves de 1910-1912, et la répression qui s'en est suivie, le terrain le plus fertile à la consolidation de leur influence face à un Parti socialiste timide et gêné par son alliance avec les républicains.

Dans ce contexte hautement conflictuel, sans commune mesure avec les temps de la Monarchie, la « question sociale » a pris des allures subversives. Les républicains se sont convaincus que seul le contrôle direct sur les organisations ouvrières leur permettait de poursuivre une politique sociale. C'est ainsi que, paradoxalement, il faudra attendre la période de déclin du mouvement ouvrier, vers le milieu des années 1920, lorsque le coup d'Etat anti-démocratique était déjà en cours, pour qu'une nouvelle tentative de synthèse de l'histoire ouvrière surgisse.

Les seules exceptions importantes au silence qui a caractérisé la période républicaine sont l'ouvrage de F. Emidio da Silva sur les grèves et la suite de monographies — succinctes, mais bien documentées— parues au Boletim do Trabalho Industrial (3) créé en 1906 auprès du ministère des Travaux publics, du Commerce et de l'Industrie. Le livre de F. Emidio da Silva (4), écrit tout de suite après la grande vague de grèves de 1910-1912, représentait une tentative sérieuse d'interprétation du phénomène des grèves dont la signification dans la vie de la jeune République était évidente. Bien qu'il s'agisse surtout d'un simple recueil systématisé des informations fournies par la presse, il n'en révèle pas moins les préoccupations de rigueur méthodologique de l'auteur, ce qui a fait pendant longtemps de cet ouvrage, publié en 1913, le seul traitement statistique des grèves au Portugal élaboré correctement. Quant au Boletim do Trabalho Industrial, résultat de l'intérêt porté à la fin de la période constitutionnelle monarchiste à la vie ouvrière, il représente la source documentaire la plus importante dont nous disposions pour toute l'époque qui s'écoule jusqu'en 1926.

Les travaux disponibles pour la période républicaine sont redevables de l'effort de collecte et de systématisation de la génération de 1905. Il s'agit de tentatives, réalisées vers la fin de la période démocratique, en vue d'établir un bilan de l'action ouvrière au cours de ces armées, avec le but évident d'en dégager les « leçons » exigées par une conjoncture dont l'issue se montrait de plus en plus obscure. C'est dans ce sens que vont les articles, les chronologies et les nécrologies publiées par Alexandre Vieira dans l'Almanaque d'A Batalha en 1926 et par Manuel Joaquim de Sousa dans son livre O sindicalismo em Portugal (5) en 1931. Tous les deux sont écrits par des militants ouvriers qui ont joué un rôle très important dans l'histoire de cette période qui commence en 1908 et qui s'écoule, à travers les tumultes de la République, jusqu'aux débats entre les communistes et les anarcho-syndicalistes pour l'hégémonie sur l'organisation ouvrière, avec pour toile de fond les menées anti-démocratiques qui ont conduit au coup d'Etat militaire du 28 mai 1926.

Qu'il s'agisse de Vieira ou de Sousa, ils ont tous les deux l'intuition que l'on a atteint un tournant dans l'histoire du mouvement ouvrier. Ils n'en saisissent pas encore toute l'ampleur, mais ils n'en ressentent pas moins l'épuisement des tactiques antérieures et le besoin de les renouveler. Manuel Joaquim de Sousa, en particulier, cherche à justifier a posteriori ses positions polémiques à l'égard des communistes et des syndicalistes révolutionnaires. Cependant, bien que les textes eux-mêmes ne l'affichent pas clairement, c'est dans le sens d'un bilan critique et justificatif que leurs lecteurs vont les interpréter, ainsi que le montrent les débats, certes amputés par la censure de la Dictature, qu'ils ont suscités. Ils représentent donc le contrepoint justificatif de la seule synthèse auto-critique d'un autre militant anarchiste de l'époque, le livre d'Emilio Costa O Sindicalismo independente (1931) (6).

L'ouvrage de M. Joaquim de Sousa a été le premier et le seul du genre. Au cours des quatre décennies suivantes, on ne publiera que des mémoires fragmentaires, des petites études documentaires et biographiques, la plupart du temps sous la forme d'articles de circonstance ou de notices nécrologiques, toujours soigneusement expurgés de toute allusion au mouvement des grèves ainsi qu'à l'action des partis et des organisations se réclamant de la classe ouvrière. Parmi les auteurs de ces documents, on compte essentiellement d'anciens dirigeants syndicalistes et anarchistes. Ce sont eux, avant tout, qui s'efforcent de transmettre la mémoire d'un passé voué chaque jour à un plus grand oubli, en sauvegardant des documents et des témoignages. Ils ne l'ont pas toujours fait d'une façon isolée, ainsi que le montre le projet collectif, malheureusement avorté, d'écrire dans les années 1940 une histoire du mouvement ouvrier portugais. Certains cercles restreints, tel le milieu des typographes, ont beaucoup fait pour conserver cette mémoire. C'est ainsi que la conscience de devoir rendre compte de ses actes historiques a poussé des hommes comme Alexandre Vieira à publier tardivement le rapport de sa mission en URSS (7), alors que le syndicat qui l'y avait envoyé avait été dissous depuis longtemps par la Dictature...

Il faut cependant mentionner une autre cause de l'oubli dans lequel tombaient peu à peu les luttes ouvrières des années 1910 et 1920. En effet, l'hégémonie grandissante du Parti communiste sur les milieux ouvriers et intellectuels de l'opposition au régime de Salazar a isolé les syndicalistes et les anarchistes qui avaient représenté la force dominante du mouvement dans le passé. Pendant les combats idéologiques très durs des années 1930, les communistes ont jeté un voile d'ignorance de plus en plus complet sur une période qui leur paraissait parsemée d'
« erreurs » et dont la tradition ne leur disait rien qui vaille. Les seules interprétations sur la période faites à la lumière des positions du PCP sont dues à Bento Gonçalves, qui a rédigé une esquisse du mouvement ouvrier de 1871 aux années 1930 à l'usage interne du Parti (8). Écrit en prison, dans de très mauvaises conditions d'accès aux sources, ce texte garde beaucoup d'intérêt en tant que tentative de légitimation de l'action des communistes face à la tradition anarchiste et syndicaliste.

Au cours du salazarisme, contrairement à ce qui s'est passé dans d'autres régimes autoritaires proches, comme l'espagnol, les doctrinaires corporatistes ne se sont nullement souciés de l'histoire ouvrière passée. L'historiographie de l'Estado Novo s'est davantage préoccupée de l'étude des corporations médiévales, afin de restaurer ou d'inventer tout un folklore de symboles et de blasons pour ses « syndicats nationaux », que d'un passé ouvrier dont le souvenir la gênait. Les idéaux corporatifs n'admettaient pas la possibilité de l'autonomie ouvrière et, de même que le Statut du Travail National avait aboli les syndicats indépendants, on tâchait d'« abolir » aussi l'histoire de l'action ouvrière indépendante. Il faut cependant, pour comprendre pleinement ce qui s'est passé sous la Dictature, tenir compte du rôle décisif joué par la censure préalable à toutes les publications. Il ne s'agissait pas seulement d'empêcher les références publiques à l'histoire ouvrière portugaise — ce qui lui aurait permis de survivre en tant, que contre-histoire dans la résistance à la Dictature —, mais encore, en abolissant toute allusion au conflit dans la parole parlée ou écrite, d'abolir, en fait le conflit en tant que possibilité de la pensée elle-même. C'est ainsi qu'une génération entière a tout naturellement « oublié », dans les années 1940 et 1950, qu'il y avait eu au Portugal des grèves, des partis politiques, des révoltes, dans un passé chronologiquement proche mais idéologiquement lointain. Ceci n'est pas propre aux sympathisants du régime, ou encore aux citoyens apolitiques, mais concerne, aussi les opposants de gauche. Une anecdote significative: lorsqu'en 1943 le PCP a réalisé son premier Congrès clandestin, aucun des membres présents ne savait que le Parti avait tenu précédemment deux Congrès, en 1921 et en 1926, et celui de 1943 a été connu pendant longtemps comme le premier Congrès du Parti...

Mais ce blocage de la mémoire ne peut pas être uniquement imputé à la censure et à la répression. Il a été également favorisé par la disparition physique de la génération de transition des années 1930, qui comprenait les militants formés au cours des dernières années du régime républicain et des premières années de la Dictature. Le gouffre de la Guerre civile espagnole, du camp de concentration du Tarrafal dans l'archipel du Cap-Vert et de la diaspora de l'exil et l'émigration a littéralement englouti ces hommes.

En outre, les intellectuels engagés dans l'opposition à la Dictature subordonnent le choix de leurs thèmes de recherche à la mythologie politique dominante. Aussi les historiens de l'opposition s'entêtaient ils à présenter l'expérience de la Première République comme un exemple de vertus démocratiques, lancée dans une oeuvre de réformes sociales hardies que seule l'action putschiste de 1926 avait empêché de se réaliser. Dominée par le souci de trouver dans le passé une image diamétralement opposée à la Dictature, l'historiographie d'opposition n'était pas intéressée à se pencher sur des luttes sociales qui révélaient la nature anti-ouvrière des gouvernements républicains. Enfin, les besoins mêmes, de l'unité d'action politique contre la Dictature rendaient inopportunes les références à un passé gênant, marqué par les divisions et par la violence verbale et physique des affrontements entre les différentes fractions républicaines.

Il n'est donc pas surprenant que lorsque s'est développé, au début des années 1970, un nouvel intérêt pour l'histoire portugaise contemporaine, et en particulier l'histoire ouvrière, les travaux qui ont paru alors se dressent contre les silences à la fois de la censure salazarienne et de l'opposition traditionnelle. Un processus de mutation politique avait eu lieu dans la décennie antérieure qu'accompagnait un mouvement de renouveau des générations. Jusqu'alors, la seule tradition politique étrangère au pouvoir était celle de l'opposition : un mélange du programme frontiste du PCP avec quelques concessions aux secteurs plus modérés, anciens républicains et futurs socialistes.

L'isolement politique créé par le régime dictatorial avait été très efficace, en empêchant les grandes polémiques qui ont traversé le mouvement ouvrier européen et la pensée socialiste de parvenir au Portugal. Entre le début des années 1930 et la fin des années 1960, pendant près de quarante ans, la seule référence constante de la pensée politique portugaise d'opposition était le marxisme du Parti communiste. Ce désert idéologique contraste avec l'intensité des débats et la mutation politique postérieures à Mai 1968, au cours desquels la découverte de la « contemporanéité » a ouvert le chemin à l'histoire ouvrière et à l'attention à la conflictualité sociale.

Les premiers livres d'histoire sociale publiés dans les années 1970 ont eu un impact considérable. Bien que rapidement saisis par la police, ces ouvrages ont connu une diffusion importante, souvent au moyen de circuits de vente alternatifs, liés au mouvement étudiant, aux coopératives, et à quelques cercles ouvriers de gauche. Ils apportaient à leurs lecteurs un sentiment de surprise en reconstituant le « chaînon manquant » de l'histoire portugaise récente, tout remplissant, dans les circonstances de l'époque, une fonction d'agitation politique et idéologique. En effet, ces livres n'ont pas été sans contribuer à fonder le contre-mythe de la radicalité et de la combativité de la classe ouvrière portugaise, en contraste avec sa passivité apparente pendant la Dictature.

Les études alors publiées par César Oliveira, Carlos da Fonseca et José Pacheco Pereira (9), ainsi que les manuscrits et les mémoires inédits de militants ouvriers tels que José da Silva et Alexandre Vieira, parus en même temps, ont mis en évidence le fait que la tradition ouvrière portugaise était bien plus diversifiée qu'on ne le pensait jusqu'alors. Ils ont aussi contribué à lancer un mouvement culturel et politique de découverte de l'histoire portugaise contemporaine en dehors des sentiers battus du manichéisme dominant. C'est un élan semblable qui a animé toute une génération de chercheurs exilés, notamment Manuel Villaverde Cabral, Fernando Medeiros et Joao Quintela (10). En revanche, s'il est vrai que l'oeuvre de ces historiens a pu se poursuivre en exil et se donner des buts plus amples, la fin du « printemps » qui a suivi la mort politique de Salazar, avec l'avènement de Marcelo Caetano, a empêché les chercheurs qui se trouvaient à l'intérieur du pays d'aller plus loin dans leurs projets.

Comme les auteurs de 1905 et de 1926, les chercheurs de 1971 risquaient de recommencer éternellement une tâche sans continuité ni fin. Leurs conditions de travail étaient non seulement mauvaises, mais encore dangereuses : en 1970, le fait de demander dans une bibliothèque portugaise un journal appelé O Comunista, par exemple, ne mettait pas seulement en danger le demandeur, mais encore l'existence même du journal jusqu'alors oublié par les censeurs des bibliothèques... Des conditions de travail aussi précaires ne pouvaient que se traduire dans la substance même des résultats : presque toujours de simples anthologies avec de brèves introductions et quelques annotations, et guère plus. En outre, l'inexistence d'études préalables, de bibliographies et de travaux de synthèse sur le Portugal contemporain a également pesé d'un poids très lourd sur l'immaturité de ces livres, qui ressemblent davantage à une revalorisation quelque peu mythique des luttes ouvrières, que les circonstances de l'époque expliquent, qu'à des études rigoureuses.

La révolution du 25 avril est venue changer totalement la situation, bien que les progrès en matière d'histoire ouvrière aient été très inférieurs à ce qu'on pouvait désirer. Avec le 25 avril, le blocage qui pesait sur la question ouvrière a cessé, et le thème, auparavant tabou, est devenu au contraire un thème à la mode, avec toutes les manifestations éphémères d'une mode. Pendant deux ans, les journaux se sont remplis d'articles sur une « résistance ouvrière » que la Dictature avait occultée. Les livres publiés au temps du « marcellisme » ont été réédités et sont devenus des best-sellers. Dans les établissements d'enseignement secondaire, les professeurs d'histoire ont introduit dans leurs programmes des questions portant sur le mouvement ouvrier, en même temps que, dans quelques Facultés, l'histoire ouvrière devenait l'objet de matières indépendantes.

Pendant ces deux premières années après la révolution sont parus principalement des recueils de textes ainsi que des interviews d'anciens militants, mais la plupart de ces matériaux pâtissent de l'empressement des auteurs, avec beaucoup de redites et très peu de sources nouvelles. La teneur propagandiste s'est accentuée et la nature rudimentaire des recherches a conduit à la répétition de certaines erreurs de fait qui se sont ainsi institutionnalisées (11).

Un tournant s'est amorcé dès 1976. C'est alors que voient le jour les travaux écrits au cours des dernières années de la Dictature et des premiers temps de la révolution, et qui font preuve d'une maturité et d'une utilité beaucoup plus grandes. Vasco Pulido Valente publie son livre (12) sur la révolution républicaine de 1910 et, bien qu'il ne se penche pas spécifiquement sur l'histoire ouvrière, il a ouvert des perspectives nouvelles et polémiques à l'interprétation de toute la période de 1910 à 1926. Il faut également mentionner les récits autobiographiques de J. Silva Marques, l'un des très rares témoignages d'un permanent clandestin du Parti communiste des années 1960, et d'Emidio Santana, un ancien dirigeant de la centrale anarcho-syndicaliste qui avait participé à l'attentat contre Salazar en 1937 (13). De même, on doit enregistrer la réédition d'organes de la presse clandestine, notamment les publications gauchistes. En revanche, il est fort dommage qu'on n'ait pas réédité, ne serait-ce que partiellement, la presse communiste, particulièrement Avante ! et Militante, qui restent des sources indispensables à l'histoire de la résistance à la Dictature, mais dont l'accès intégral demeure extrêmement difficile.

En fait, le bilan de l'état actuel de l'historiographie portugaise révèle le caractère très inégal de nos connaissances sur l'action ouvrière passée. Cette inégalité relève avant tout du déséquilibre chronologique et thématique inhérent aux circonstances pénibles dans lesquelles les études d'histoire ouvrière ont été réalisées jusqu'ici. Il s'agit d'abord d'un déséquilibre chronologique, car on connaît très peu de choses sur le XIXe siècle ainsi que sur la période de L'Estado Novo, alors que, par comparaison, les travaux concernant la période de 1910-1926 abondent. S'il est naturel que la période de la Dictature soit encore très mal connue, en revanche, le silence sur le XIXe siècle pose des problèmes plus intéressants.

En effet, l'histoire ouvrière a été presque toujours écrite par des auteurs de formation marxiste et à la faveur des circonstances politiques dont elle était elle-même partie prenante. Aussi, on s'est beaucoup plus intéressé aux conflits, aux mécanismes et aux formes de la rupture et de l'autonomie ouvrières qu'à la « paix sociale » et à l'étude de l'intégration dans le système social et politique. Bien que dans notre histoire contemporaine la « paix sociale » soit en effet un phénomène rare, il est évident que toute l'histoire ouvrière n'est pas une histoire de conflits. Or l'inflation des études sur la période républicaine, et tout particulièrement les années de l'après-guerre, recèle en elle-même le préjugé selon lequel le conflit, la grève surtout, montre le vrai visage des ouvriers.

Le déséquilibre chronologique conduit à son tour à un déséquilibre thématique, à la prédominance de la sphère politique, conçue souvent au sens le plus restreint, qui a amené à ce qu'on mette l'accent, dans l'historiographie ouvrière, sur l'indépendance de la lutte ouvrière, particulièrement au cours de la période 1910-1926, en escamotant ainsi l'influence des partis « bourgeois » sur l'action des ouvriers.

Les travaux publiés entre 1977 et 1981 ont soit une origine militante, soit une origine universitaire. Et bien que les premiers soient encore abondants, la qualité générale des travaux est beaucoup plus élevée qu'auparavant. La publication d'ouvrages autobiographiques, presque toujours à caractère militant, reste surtout le fait d'anciens anarchistes et syndicalistes, tels David de Carvalho, Acácio T. d'Aquino, J. Reis Sequeira, ainsi que l'ouvrage collectif sur la grève révolutionnaire du 18 janvier 1934 (14). Malgré leur caractère souvent chaotique, ces ouvrages présentent un énorme intérêt pour comprendre la vision du monde de ces militants qui, à travers le syndicalisme et l'anarchisme, ont façonné le mouvement ouvrier des années 1920. La vie ouvrière, le séjour toujours bref à l'école, le long apprentissage autodidacte, les rapports avec le métier, tout y est dépeint en coexistence avec des réflexions d'ordre historique et politique.

Une place singulière revient, dans cette phase des études ouvrières, à l'oeuvre de Carlos da Fonseca, História do Movimento Operario (15). Elle représente, à ce jour, la tentative la plus ambitieuse de fournir un corpus documentaire et bibliographique systématique sur le mouvement ouvrier. Conçue et partiellement réalisée il y a plusieurs années, sa publication tardive se ressent de la comparaison avec le développement ultérieur des études ouvrières. Elle demeure cependant unique en son genre, avec des éléments irremplaçables sur les grèves, le mouvement social catholique, les congrès ouvriers du XIXeme siècle, outre une chronologie et une bibliographie générales assez complètes.

Toutefois, l'aspect qui caractérise le mieux la production des dernières années est l'ascendant pris par l'historiographie et la recherche universitaires. Les études d'Oliveira Marques, Fernando Medeiros et Manuel Villaverde Cabral (16) ont rendu la Première République mieux connue, en même temps qu'ils se penchaient sur le rôle des mouvements sociaux non seulement dans l'évolution du régime républicain, mais encore dans sa chute. De leur côté, Maria Filomena Monica et Vasco Pulido Valente ont avancé dans le sens d'une connaissance interne de la classe ouvrière et de ses groupes professionnels, ainsi que des formes d'action revendicative ou révolutionnaire (17), Il est intéressant de noter cependant que la contribution universitaire la plus importante aux études ouvrières n'est pas venue des historiens, mais des sociologues.

Au début des années 1980, l'historiographie ouvrière au Portugal se trouve toujours à un carrefour (18). L'histoire militante y détient encore un poids considérable, mais les chercheurs universitaires jouissent de conditions de travail bien meilleures. L'histoire militante bénéficie, quant à elle, de la possibilité de mobiliser les efforts de nombreux amateurs, dont le rôle de défricheurs peut contribuer à combler le retard de la recherche. En outre, elle permet de donner la parole à beaucoup d'ouvriers, militants ou pas, dont l'expérience risque de se perdre. Enfin, elle contribue à créer un public spécifique, tout en élargissant l'intérêt de la société en général pour le passé ouvrier.

D'un autre côté, l'introduction des études ouvrières à l'Université est venue combler une lacune énorme des curricula consacrés à l'histoire contemporaine et aux mouvements sociaux. Mais le Portugal ne rattrapera pas facilement son retard, car si les perspectives sont bien meilleures qu'auparavant, les études ouvrières rencontrent toujours des difficultés dans le milieu universitaire conservateur.

Enfin, les deux tendances auxquelles nous venons de faire allusion ont eu dans le passé proche un moment de rapprochement privilégié: les travaux des auteurs exilés des années 1970, qui ont pu allier leurs préoccupations politiques aux exigences de rigueur du travail scientifique. La dualité de ces deux traditions suppose en effet des objectifs, des méthodes et des publics distincts, mais l'unité de leur objet, ainsi que l'empathie commune avec la condition et la destinée ouvrières, doit ouvrir la voie à la collaboration des efforts et au débat.



(1) S. MENDES Socialismo Libertario ou Anarquismo, Historia e Doutrina Coïmbre, 1896.

(2) L. GONÇALVES, A Evolução do Movimento Operârio em Portugal, Lisbonne. 1905; J. Campos LIMA, Movimento Operario em Portugal, Porto, Afrontamennto, (réédition) ; F. Emidio da SILVA, O Operariado Português na Questao social, Lisbonne, 1905; J. Lobo d'AVILA LIMA, Movimento Operario em Portugal, Lisbonne 1905.

(3) Ministério das Obras Públicas, Comércio e Indûstria, Boletim do Trabalho Industrial, après 1906.

(4) F. EMIDIO da SILVA, AS Grèves, Coïmbre, 1913.

(5) M. Joaquim de SOUSAO, Sindicalismo em Portugal, Lisbonne,,1931.

(6) E. COSTAO, Sindicalismo Independente, Lisbonne, Seara Nova, 1931.

(7) A.VIEIRA, Delegacia a um Congresso Sindical, Lisbonne, 1960.

(8 )B. GONÇALVES, Palavras Necessarias et Duas Palavras, publiés clandestine-ment dans les années 1960.

(9) C.OLIVEIRA A, Comuna de Paris e os Socialistas Portugueses, Porto, Brasilia, 1971, O Congresso Sindicalista de 1911, Porto, Afrontamento, 1971; A Criacao da Uniao Operaria Nacional, Porto, Afrontamento, 1973; C. da FONSECA, A Origem da I International em Lisboa, Lisbonne, 1973; J. Pacheco PEREIRA, As Lutas Operarias Contra a Carestia de Vida, Porto, Portucalense, 1971.

(10) M.VILLAVERDE CABRAL, O desenvolvimento do Capitalismo em Portugal no século XIX, Lisbonne, Regra do Jogo, 1976; F. MEDEIRO A Sociedade e a Economia Portuguesa nas Origens do Salazarismo, Lisbonne, Regra do Jogo, 1978; J.G. QUINTELA , Para a História do Movimento Comunista em Portugal : I. A Construçao- Partido (1919-1929) Porto Afrontamento, 1976.

(11) Bento Gonçalves, Porto, Opiniao, 1976; J. Dias COELHAO, Resistência em Portugal, Porto, Inova, 1974; P. SOARES Tarrafal Campo da Morte Lenta, Lisbonne, Avante, 1975; Tarrafal - Testemunhos, Lisbonne, 1978; R. E. dos SANTOS, Os Tabacos - Sua Influência na Vida da Nação, Lisbonne, Seara Noya,1974.

(12) V. Pulido VALENTE, Poder e o Povo. A Revolução de 1910, Lisbonne, D; Quixote, 1976. 1976;

(13) J. Silva MARQUES, Relatos da Clandestinidade, Lisbonne, Expresso,1976, E. SANTANA História de um Atentado- o Atentado a Salazar, Lisbonne, Forum, 1976.

(14) D. de CARVALHO, Os Sindicatos Operarios e a República Burguesa (1910-1926), Lisbonne, Seara Nova, 1977; A.T. d'AQUINO, O Segredo das Prisões Atlânticas, Lisbonne, Regra do Jogo, 1978; J.R. SEQUEIRA, Relembrando e Comentando, Lisbonne Regrado Jogo, 1978; O 18 de Janeiro e Alguns Antecedentes, Lisbonne, Regra do Jogo, 1979.

(15) C. da FONSECA, História do Movimento Operario e das Ideias Socialistas Portugal,vol. I-IV, en cours de publication.

(16) O. MARQUES, Historia da 1e Republica Portuguesa - As Estruturas de Base, Lisbonne, Iniciativas Editoriais, 1978; M. VILLAVERDE CABRAL, Operariado nas Vésperas da República, Lisbonne, Presença, 1978; Portugal na Alvoradado Século XX, Lisbonne, Regra do Jogo, 1979. .

(17) M. Filomena MONICA, « Uma Aristocracia Operária : os Chapeleiros», Analise Social, 1979 et «Mort d'une aristocratie ouvrière : les ouvriers chapeliers portugais (1870-1914), Le Mouvement social, avril-juin 1983; V. Pulido VALENTE, «A revolta dos abastecimentos : Lisboa, Maio de 1917», Economia, mai 1977, articles du numéro monographique sur la classe ouvrière de Analise Social 1981.

(18) En témoigne le volume d'actes du colloque de Paris des 10-13 janvier1979. Utopie et socialisme au XIXe siècle, Paris, Fondation Calouste Gulbenkian 1982.

sexta-feira, 15 de janeiro de 2016

Pirates de la liberté / Xavier Montanyà

Histoire détonante d'un détournement de paquebot et de la lutte armée contre Franco et Salazar (1960-1964)

"Le 21 janvier 1961, des révolutionnaires espagnols et portugais exilés en Amérique latine détournent en haute mer un navire transatlantique portugais, le Santa Maria, avec un millier de passagers à bord. S’ensuivent douze jours de poursuite et de négociations diplomatiques intenses qui font la une des médias et tiennent le monde entier en haleine.
Ces hommes du Directoire révolutionnaire ibérique de libération (DRIL) agissent pour relancer la lutte armée contre Franco et Salazar, rappeler l’existence des deux dernières dictatures d’Europe et accoster dans leurs colonies africaines afin d’y créer un foyer de guérilla pour l’indépendance.
Ce récit captivant rend hommage à ces militants et révèle une part méconnue de l’histoire des combats contre les fascismes ibériques, tout en les replaçant dans le contexte politique international de l’époque (révolution cubaine, indépendances africaines, intégration de l’Espagne au bloc occidental…). À partir de cette prise d’otages spectaculaire, ce livre nous plonge dans l’Espagne franquiste des années 1960, explore ses mécanismes de répression et de propagande, son évolution interne, son alliance avec la dictature de Salazar, ou encore la collaboration des démocraties occidentales. Enfin, il décrit avec minutie la réactivation des résistances anarchistes et de l’action directe contre le régime de Franco autour de ce coup d’éclat du DRIL."

Éditions L'Echapée - Traduit du catalan par Raphaël Monnard 288 pages / 978-2-37309-003-1 / 20 euros


- VOIR AUSSI -

O DRIL (1959-61). EXPERIÊNCIA ÚNICA
NA OPOSIÇAO A0 ESTADO NOVO

D. L. Raby


De maneira geral, o Directório Revolucionário Ibérico de Libertação (DRIL) só é conhecido em Portugal pela sua acção mais espectacular, o assalto ao paquete Santa Maria em _laneiro-Fevereiro de 1961. O capitão Henrique Galvão, dissidente militar do regime de Salazar, dirigiu a operação pela parte portuguesa, em aliança com um grupo de Espanhóis chefiado por Jorge Sotomayor e José Velo Mosqueral. Embarcaram na Venezuela, alguns deles clandestinamente, outros como passageiros legítimos mas com armas escondidas nas bagagens, e depois tornaram conta do navio com o objectivo declarado de seguir rumo a África, para participar num movimento revolucionário contra o Estado Novo. Por motivos vários não chegaram a África, e, perseguidos pela Armada norte--americana, procuraram asilo no Brasil. Apesar do fracasso do objectivo original, a operação teve um impacto internacional sem precedentes e foi um golpe tremendo no prestígio do regime português.


Galvão participou na Operação Dulcineia, nome de código do assalto ao navio, como representante do Movimento Nacional Independente (MNI) do general Humberto Delgado, exilado no Brasil desde Abril de 19593. Com a aprovação dc Delgado, Galvão assinara em Janeiro de 1960 um acordo com os espanhóis em Caracas - acordo que terá sido, na sua versão, o acto fundador do DRIII. A impressão mais generalizada, aliás, é que o DRIL, sem dúvida uma interessante tentativa de criar uma frente única luso-espanhola de oposição, terá sido uma organização fantasma, pouco estruturada e efémera. A realidade porém, mais complexa e mais interessante.

Agora é possível afirmar que o DRH, foi a expressão orgânica de um movimento revolucionário luso-espanhol com ramificações internacionais de certa importância. Se foi efémero - depois de finais de 1961 já não existia na prática -, na sua breve existência chegou a ter um impacto importante e a preocupar seriamente os governos de Portugal, de Espanha e de vários outros países. Especificamente, há provas claras de que o DRIL tinha apoio cubano e talvez algum apoio não oficial do México, da Venezuela ou da Iugoslávia Na primeira fase da Revolução Cubana, o entusiasmo revolucionário pan-latino--americano levou os Cubanos a apoiar uma expedição contra o regime de Trujillo na República Dominicana e a patrocinar movimentos contra outras ditaduras latino-americanas, e também a solidarizar-se com os Espanhóis antifranquistas. Na Venezuela, embora o governo de Rómulo Betencourt procurasse manter boas relações com todos os países ocidentais. depois da revolução que em 1958 derrubou a ditadura de Pérez Jiménez, o ambiente era favorável a outros movimentos revolucionários. No México, único país latino-americano que nunca reconheceu o governo de Franco, também havia uma grande simpatia nos meios oficiais pelos republicanos espanhóis; simpatia que não chegava ao apoio declarado a movimentos revolucionários, mas também não excluía a tolerância, ou talvez um discreto apoio clandestino. 

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